Miliciens paraguayens (2002)

L’un des ouvrages fondamentaux pour comprendre la participation des brigadistes paraguayens à la Guerre Civile espagnole est le livre dont la couverture peut être vue dans cet objet : cet ouvrage, intitulé «Milicianos paraguayos en la España republicana y en la lucha contra la ocupación nazi», a été écrit par le brigadiste paraguayen Victor M. Martínez Ramírez sur la base de ses souvenirs et de ceux d'un autre brigadiste paraguayen, Tomás Vera (qui apparaît comme co-auteur du livre, à la demande des deux).

L'histoire de ce petit livre est très importante, non seulement car il constitue l'un des rares documents mémoriels dont nous disposons sur l'expérience des volontaires paraguayens dans la Guerre Civile espagnole, mais aussi car il reflète bien l'histoire du Paraguay pendant la dictature du général Alfredo Stroessner (1954-1989). L’ouvrage de Martínez y Vera a été manuscrit à l'origine par Víctor Martínez lui-même en 1969 ; il l'a rédigé à son retour en Argentine, après avoir visité Moscou avec sa femme, la milicienne espagnole Adela Dueñas. Sur le chemin de retour de Moscou, Martinez et Dueñas sont passés par Paris, où ils ont rencontré Tomás Vera (qui résidait dans la capitale française depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale).

L'ouvrage manuscrit a ensuite été dactylographié par Víctor Martínez lui-même en 1980 - on ignore s'il y a eu des changements par rapport au texte original -, qui l'a remis à son ami de toujours, Alfonso Guerra (ils se sont connus comme militants du Parti communiste paraguayen, en 1936, il y a près de cinquante ans). Guerra a été chargé d'éditer et de publier l'ouvrage ; Víctor Martínez est décédé en 1983, peu après la remise du document. L'ouvrage n'a cependant vu le jour qu'en 2002, la dictature d'Alfredo Stroessner au Paraguay rendant difficile la publication d'un tel livre, qui pouvait également compromettre les familles des brigadistes paraguayens.

Le livre a été publié avec la collaboration des proches de Víctor Martínez, en particulier de sa fille aînée Mariadela Martínez Dueñas. Dans l’avant-propos de l'ouvrage, il est indiqué que ces mémoires «constituent des témoignages émouvants d'une période de lutte dramatique pour la liberté sur les terres d'Espagne», mais il s’agit aussi d’un livre qui contient un exercice important de mémoires de description, d'analyse et de précision de certains événements que les brigadistes paraguayens ont vécu à la première personne, et pas seulement des témoignages émouvants.

Un dernier détail important et intéressant : dans cette œuvre, Martínez et Vera ont décidé d'omettre le nom de Vicente Durá Campos (un autre des brigadistes paraguayens qui a survécu à la guerre en Espagne et aux camps d'internement en France). En 1969, après que Víctor Martínez et Tomás Vera se soient rencontrés à Paris, lorsque Martínez a écrit l'œuvre à son retour à Rosario (Argentine), Durá Campos vivait encore au Paraguay sous la dictature militaire. C'est pourquoi ils ont décidé que le nom de Vicente Durá n'apparaîtrait pas dans le texte qu'ils ont écrit, afin de protéger son identité face au régime stroniste.

ETB