“Le caudillo”
Creator: Orbegozo Urruela, Antonio (1908-1995)
Source:
El Fascio, 16 March 1933
Date Created: 1933-03-16
Type: Gravures sur bois
Extent: 1 item
Le premier et unique numéro d’El Fascio est paru le 16 mars 1933, trois mois après l'arrivée au pouvoir d'Hitler. Manuel Delgado Barreto, ancien rédacteur en chef de La Nación, le journal officieux de la dictature de Miguel Primo de Rivera, en est le rédacteur en chef. Le journal n'a guère été diffusé, les exemplaires ayant été saisis par la police et le gouvernement ayant interdit sa publication sur la base de la loi pour la défense de la République.
Il s'agit néanmoins d'une étape importante dans la construction du fascisme espagnol. José Antonio Primo de Rivera y rédige la première ébauche du programme de la Phalange, qu'il ne fondera que le 29 octobre de la même année, et Ernesto Jiménez Caballero, Rafael Sánchez Mazas et Ramiro Ledesma apparaissent tous dans ses pages. Il comportait également des illustrations d'Antonio Orbegozo, dont l'une est visible ici.
El Fascio reflète la dérive autoritaire d’une partie de la droite européenne. Après la fin de la Grande Guerre, le vertige s'est répandu chez ceux qui estimaient que l'ordre social était au bord du précipice. Des institutions millénaires, comme les grands empires, ont succombé. Le conflit a disloqué l’économie mondiale et perturbé les marchés du travail, encourageant une vague d’agitation ouvrière. La révolution, triomphante en Russie, est sur le point de s’étendre à la Hongrie et à l’Allemagne en 1919.
L'impact de tout cela a déclenché une vague de panique au sein de la société conservatrice, ce large éventail de groupes sociaux affrontant le conglomérat non moins diffus de forces prônant la révolution sociale. Les temps nouveaux apportaient de nouvelles menaces et il était nécessaire d’articuler de nouvelles idées, de nouveaux discours, de nouvelles stratégies pour conjurer le chaos qui menaçait de tout balayer.
De nombreux citoyens ont rejeté les valeurs politiques libérales telles que la foi en l'individu et ses droits, ou le parlementarisme et la pluralité, associées au passé et jugées inutiles à la survie dans le monde chaotique qu'ils entrevoyaient. Ils se sont plutôt accrochés à des symboles, des attitudes et des croyances qu'ils percevaient comme plus solides et plus essentiels, tels que la religion, l'ordre ou l'autorité.
Dans toute l’Europe, des formations ont vu le jour qui aspiraient à créer des communautés nationales homogènes. Des communautés purgées des groupes ou des individus identifiés comme ennemis de la nation, un large éventail allant des groupes ethniques aux organisations ouvrières de gauche, en passant par les partis libéraux ou démocratiques.
Ces partis aspiraient à conquérir l'État afin de propulser, à partir de là, le mouvement de la communauté vers cet idéal national sublimé. Mais un tel mouvement nécessite un leader, un chef d’orchestre, un guide pour conduire la nation. Dans chaque pays, il a reçu un nom spécifique qui faisait allusion à sa capacité à diriger le peuple élu : Duce, Führer, Conducator...
C'est la question que s’est posée Orgebozo en mars 1933. À savoir, si l'Italie a son Duce et l'Allemagne son Führer…qui serait le Caudillo pour diriger un tel mouvement en Espagne ?
MML