“On… ne… passe… pas!"
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Date Created: 1916
Type: Postcards
Extent: 1 item
« On…ne…passe…pas ! » criaient les Français face aux offensives successives des Allemands pendant la Grande Guerre. Un slogan qui deviendra au fil des ans le “¡No pasarán !” scandé par les milices républicaines lors de l'assaut franquiste de Madrid, en novembre 1936.
L’ombre du conflit mondial a marqué les décennies qui séparent les deux épisodes. Les Allemands n'ont pas franchi les défenses françaises mais le coût a été brutal : 10 millions de soldats sont morts sur le front, auxquels il faut ajouter 6 millions de victimes civiles et 20 millions de combattants blessés, dont beaucoup sont mutilés à vie. Cette hécatombe a décimé une génération de jeunes Européens et redéfini la valeur relative de l'existence humaine.
Le sentiment que tout est éphémère et extraordinaire imprègne la culture européenne, la politique, l’économie et les loisirs, et un vitalisme exacerbé encourage la recherche de nouvelles émotions. Il y a ceux qui déplorent la fin d’un « monde ordonné, avec des strates bien définies et des transitions sereines », comme l’écrit Stefan Zweig, et ceux qui célèbrent la destruction de l’ordre ancien et l’avènement d’une nouvelle ère dans l’histoire de l’humanité. Vertige et peur, anxiété et mélancolie coexistaient dans un état d’esprit que l’historien Charles Maier a qualifié d’« anxiété sociale ».
La guerre a remodelé la carte de l’Europe. Elle a liquidé les empires russe, allemand, austro-hongrois et ottoman, sur les territoires desquels sont nés une dizaine de pays, et a déplaçé les frontières d'une demi-douzaine d'autres. La politique a muté dans sa forme et son contenu. Les citoyens mobilisés pendant le conflit veulent peser sur les affaires publiques. Certains pays se démocratisent, accordent le droit de vote aux femmes et s’orientent vers l’État-providence. D’autres ont canalisé la participation politique par des mouvements populistes ou l’ont restreinte par des régimes autoritaires.
Dans le même temps, la révolution soviétique a encouragé la dérive insurrectionnelle d’une partie du mouvement ouvrier et la réaction viscérale de ceux qui étaient prêts à la combattre depuis des positions conservatrices. La violence, révolutionnaire ou réactionnaire, devient partie intégrante du combat politique.
Jamais un effort de guerre n'avait nécessité un tel degré d’intervention économique de l'État. Pendant la guerre et l'après-guerre, les principes directeurs de l'orthodoxie libérale classique, comme la foi dans le progrès, l'équilibre budgétaire ou la bonne valeur de l’argent, sont devenus obsolètes. Alors que l’économie mondiale semblait retrouver une certaine stabilité, une nouvelle crise mondiale a éclaté en 1929, érodant encore davantage la confiance dans les institutions démocratiques.
MML