Loi sur les fuites
Creator: Gómez, Helios (1905-1956)
Source:
Biblioteca Nacional de España
Date Created: 1935
Extent: 1 item
50.84656, 4.3517
La “ley de fugas” (loi sur les fuites) consiste à laisser fuir un détenu afin de pouvoir lui tirer dans le dos, et ainsi simuler son évasion. Il s'agit d'une pratique utilisée en Espagne du milieu du XIXe siècle jusqu'aux années cinquante du XXe siècle. Malgré son nom, elle n'a jamais fait partie du droit pénal espagnol, mais plutôt d'une norme non écrite utilisée pour commettre des exécutions extrajudiciaires et violer la loi de l'Habeas Corpus.
La loi sur les fuites prend une importance considérable à partir de 1870 à la suite de la montée du banditisme. Entre la fin du XIXe siècle et le début de la Guerre Civile, la loi sur les fuites a été utilisée pour combattre l'essor des mobilisations ouvrières. Cette estampe de 1935 de l’artiste anarchiste Helios Gómez est une représentation forte de cette pratique. Mais ce mode d'exécution va prendre une importance sans précédent entre 1936 et 1952. C'est dans les zones de guerre irrégulière que l'utilisation de cette méthode s'est le plus intensifiée. Dans ces années-là, les gardes civils rédigent souvent des rapports répétant la même formule ou une formule similaire : les détenus « ont fait une course rapide ». Il s'agissait d'une construction grammaticale qui dissimulait l'assassinat de guérilleros et de civils.
Certains officiers de la Garde civile sont devenus de véritables spécialistes de son application. Pour ne citer qu'un exemple, le 6 décembre 1940, les forces de la Garde civile de Cáceres ont arrêté quatre guérilleros et entamé une chasse qui s’est soldée par l’arrestation de 26 paysans. Le seul crime commis par les habitants de Zorita, Logrosán et Cañamero était qu'il y avait des guérilleros dans la région et qu'ils étaient en liberté surveillée. Les trente personnes ont été assassinées sans avoir été condamnées par une cour martiale. Il a suffi d’un ordre direct du chef de la région.
L'arrivée du général Camilo Alonso Vega à la direction générale de la Garde civile en 1943 a normalisé l'utilisation de la loi sur les fuites. Cette même année, il convoque à Madrid les commandants responsables de la guerre antipartisane et leur fait part de la détermination du gouvernement d’en finir avec les guérillas à tout prix. En fait, les années suivantes et lors de diverses réunions, il leur a rappelé que les forces de l'État jouissaient d'une liberté totale en matière d'assassinat. Par exemple, le 24 décembre 1946, le Caudillo rappelle à Alonso Vega que les gardes peuvent « tirer sans sommation ».
AFP