Solidarité avec l'Espagne à Calcutta, 1936
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Le mouvement ouvrier de Kolkata (Calcutta) a répondu à l’appel internationaliste de gauche en faveur de la solidarité avec l’Espagne républicaine pendant les premiers mois de la Guerre Civile espagnole. Le 9 août 1936, sur le Maïdan, vaste espace vert adjacent au monument d'Ochterlony - aujourd'hui, le Monument aux Martyrs - un lieu traditionnel pour les réunions publiques, comme le montre cette photo, un rassemblement syndical, composé de 24 organisateurs et une cinquantaine d'ouvriers, a célébré la «Journée de l'Espagne» à Calcutta.
Malgré les significations perdues entre la bouche de l'orateur et les oreilles et carnets de l'observateur de la police, les descriptions fournies dans les rapports de la Branche du Renseignement de la Police du Bengale et de la Branche Spéciale de la Police de Calcutta indiquent qu'une vision plus large du monde sur les liens entre le capital, la construction d’un empire et le fascisme était diffusée par les organisateurs syndicaux de gauche. Leur objectif était de motiver et d’éduquer les travailleurs qui formaient déjà des syndicats militants pour faire avancer leurs revendications économiques et politiques.
Lors du premier rassemblement de soutien à l'Espagne organisé le 9 août 1936 par le All India Trade Union Congress (AITUC), un agent de la section spéciale a signalé que plusieurs «partis syndicaux de Calcutta» sympathisaient avec les communistes espagnols qui menaient une guerre contre les fascistes. Les pancartes défendaient le gouvernement du Front populaire en Espagne, exigeaient la fin des mauvais traitements subis par les prisonniers politiques dans les prisons coloniales en Inde, condamnaient les tirs sur les manifestants à Pondichéry alors française, et exhortaient les travailleurs du monde entier à s'unir contre le fascisme et la contre-révolution en Espagne. Les campagnes syndicales, interprovinciales et anti-impérialistes ont ainsi été intégrées dans la campagne de soutien au Front populaire en Espagne. Le meeting a été ponctué de slogans en hindoustani et en bengali : « Victoire au drapeau rouge », « Victoire au parti des travailleurs », « Victoire aux travailleurs du monde », « Victoire à un gouvernement d’ouvriers et de paysans », « Victoire à l'unité des travailleurs », « Que l'impérialisme soit détruit » et « Inquilab Zindabad » (Vive la révolution).
Le 12 août 1936, en début de soirée, la Journée de l'Espagne a été célébrée au parc Shraddhânanda, sous les auspices de l'AITUC. On s’attendait à une foule plus nombreuse que trois jours auparavant. Une affiche accrochée à la balustrade du parc proclamait : «À bas la contre-révolution fasciste». Une cinquantaine de personnes s'étaient d'abord rassemblées, mais leurs rangs ont progressivement augmenté jusqu'à atteindre 200 personnes. Vers 17h55, Sibnath Banerjee, s’exprimant en bengali, a fait remarquer que les capitalistes s’étaient rebellés contre un gouvernement ouvrier en Espagne. Ce qui se passait là-bas va se passer en Inde à l'avenir. Le capital mènera une lutte à mort contre les ouvriers et les paysans pour les empêcher d'atteindre des conditions de vie prospères. L'issue du conflit en Espagne ne manquera pas d'avoir un impact sur la politique internationale et l'Inde et son peuple ne peuvent rester indifférents. Shamsul Huda, s'exprimant en bengali, a déclaré que les impérialistes et les fascistes étaient unis dans une conspiration visant à détruire le gouvernement des ouvriers et des paysans en Espagne. Les masses laborieuses de l'Inde doivent soutenir le gouvernement espagnol. Pour établir le régime des travailleurs et des paysans dans ce pays, le peuple indien, qui a été exploité, opprimé et dont le sang a été sucé pendant 150 ans, doit résister au fascisme et à l'impérialisme. D'autres, s'exprimant également en bengali, ont fait le lien entre les conditions de famine dans le pays et le fonctionnement des banques, du capital et de l'impérialisme et ont soutenu la lutte de l'Espagne contre le fascisme.
SC