Caveau des volontaires français, cimetière Père Lachaise
Situé dans le 20e arrondissement de Paris, le Père-Lachaise est connu, entre autres, pour être la dernière demeure de Jim Morrison et d’Oscar Wilde. Il s’agit donc là autant d’un cimetière que d’un musée à ciel ouvert. Et comme tout musée, le Père-Lachaise a ses stars, ses mascottes et ses « angles morts ». Parmi ceux-ci, la section dévolue aux combattants républicains de la guerre d’Espagne – localisée dans un coin ombragé du quart nord-est du domaine – reste relativement confidentielle, surtout comparée aux subdivisions voisines consacrées à la Shoah et à la Commune de Paris.
Cependant, cet endroit compte quelques « résidents » célèbres, comme Francisco Largo Caballero – premier ministre de septembre 1936 à mai 1937 –, la photographe allemande Gerda Taro – disparue dans un accident après la bataille de Brunete – et le docteur polonais Mieczysław Domanski-Dubois – volontaire dans la XIVe Brigade internationale tombé à Belchite. Bien que les tombes soient plutôt humbles, elles sont bien entretenues, et certaines sont même décorées de couronnes de fleurs et de drapeaux et écharpes aux couleurs de la République espagnole. Plus généralement, cette zone est caractérisée par un certain œcuménisme idéologique. Il est aussi notable que cette section est située dans la partie du cimetière qu’on pourrait nommer « le coin des communistes », où plusieurs membres importants du Parti communiste français (PCF) ont été inhumés.
Comme une sorte de lien symbolique entre la section du PCF et la partie dédiée à la guerre d’Espagne, un caveau contenant les dépouilles de trois Brigadiers – Gabriel Fort, Boris Guimpel, and Tadeuscz Oppman – rend hommage au rôle central qu’a joué le PCF dans le recrutement de combattants. En effet, Paris fut une véritable plaque tournante pour les volontaires en route pour l’Espagne. C’est aussi dans cette ville que se trouvait le siège des Brigades internationales. D’ailleurs, Pierre Georges, un autre vétéran de la guerre civile et Résistant célèbre – mieux connu sous le nom de « Colonel Fabien » – est enterré non loin de là.
Alors que la plupart des républicains du Père-Lachaise sont enterrés dans cette zone, il est intéressant de noter que la tombe de Juan Negrín – premier ministre de mai 1937 à mars 1939 – se situe à une certaine distance des autres. Cela n’est pas surprenant, dans la mesure où il reste une figure controversée au sein de la gauche. Nombre de républicains, dont des membres du PSOE, ont critiqué ses tendances autoritaires et son attitude complaisante envers Moscou. Comme Negrín s’est éteint en 1956, cet ostracisme posthume peut se concevoir, à une époque où la mémoire de la guerre restait vive. Cela dit, cette tombe esseulée est inopportunément discrète si l’on considère l’importance de cet homme d’État – seules ses initiales sont gravées sur la pierre tombale, accompagnées d’un tout petit drapeau républicain.
AB-V